Proposition de loi sénatoriale visant à interdire la corrida aux moins de 16 ans

Publié le par PSY

Une proposition de loi (PPL) transpartisane visant à tenir les moins de seize ans à l'écart des corridas vient d'être déposée au Sénat.
Comme nous le précisons sur la première page de notre site, les premiers à devoir être protégés des corridas sont bien sûr les taureaux. Mais les corridas étant des spectacles violents ("sévices graves ou actes de cruauté envers les animaux" selon le code pénal français), au souci de protection des animaux s'ajoute le souci de la protection de la jeunesse.
Tant que les spectacles tauromachiques sanglants persisteront, il importe d'en écarter les mineurs.

La PPL

Le 27 mars, les sénateurs Samantha Cazebonne et Arnaud Bazin ont déposé une proposition de loi (PPL) visant à interdire la corrida et les combats de coqs en présence de mineurs de moins de seize ans.


On peut lire ce qui s'appelle l'"exposé des motifs" ici.

On peut lire le texte proprement dit ici.

 . L'article 1er concerne le onzième alinéa de l'article 521-1 du code pénal.
Pour rappel, cet article du code pénal sanctionne "le fait, publiquement ou non, d'exercer des sévices graves ou de commettre un acte de cruauté envers un animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité".
Le onzième alinéa spécifie que "Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux courses de taureaux lorsqu'une tradition locale ininterrompue peut être invoquée. Elles ne sont pas non plus applicables aux combats de coqs dans les localités où une tradition ininterrompue peut être établie."

 . L'article 2 concerne le second alinéa de l’article 522-1 du code pénal.
Pour rappel, cet article du code pénal, créé par la loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale, sanctionne "le fait, sans nécessité, publiquement ou non, de donner volontairement la mort à un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité, hors du cadre d'activités légales".
Et le second alinéa consiste en les mêmes dérogations que pour l'article 521-1.

Cette proposition de loi inclut logiquement les combats de coqs, puisque ceux-ci sont mentionnés par les mêmes alinéas.

Et précisons qu'elle vise également les 4 ou 5 "écoles de tauromachie" françaises, ces associations où les mineurs s'entrainent sur des veaux et des taurillons, qu'ils peuvent tuer en privé à partir de l'âge de 13 ans.

Les auteurs

Samantha Cazebonne

Samantha Cazebonne est une sénatrice du groupe RDPI, Rassemblement des Démocrates, Progressistes et des Indépendants (en majorité du parti Renaissance). 

Avant d'être élue sénatrice en octobre 2021, elle était députée.
En octobre 2019, elle avait organisé à l'Assemblée Nationale un colloque sur la protection de l'enfance contre toutes les formes de violence, à l'occasion du 30ème anniversaire de la Convention Internationale des Droits de l'Enfance (CIDE).  Une des tables rondes du colloque était consacrée à l'exposition à la violence exercée sur les animaux, celle-ci concernant en premier lieu en France la tauromachie sanglante.

A cette occasion, la députée avait annoncé une PPL visant à protéger les enfants (les mineurs au sens de la CIDE) de l'exposition à la violence exercée sur les animaux,  conformément aux recommandations du Comité des droits de l'enfant à la France en 2016.
Cependant, cette PPL, qui avait pour dessein d'être mise à l'ordre du jour et discutée en séance, ne fut pas déposée, car à partir de janvier 2020 l'épidémie de Covid-19 prit de plus en plus d'ampleur en France, avec les conséquences que l'on sait.

Arnaud Bazin

Arnaud Bazin est un sénateur du groupe Les Républicains (largement majoritaire au Sénat).
Il est vétérinaire de profession, soucieux de la condition animale, mais également du lien entre les violences sur les animaux et les violences sur les humains.

Il a ainsi été à l'origine du colloque intitulé "Une seule violence" qui s'est tenu en mars 2023.

Début 2023 (le 10 janvier et le 13 janvier), Arnaud Bazin et Samantha Cazebonne avaient chacun de leur côté déposé des PPL visant à mettre les mineurs à l'écart des corridas et des combats de coqs.

Puis ils se sont donc accordés pour déposer cette nouvelle PPL transpartisane.

Et par ailleurs

Raymonde Poncet-Monge

Il faut également signaler le dépôt en novembre 2023 par le groupe EST (Écologiste – Solidarité et Territoires) du Sénat d'une PPL visant à interdire les corridas et les écoles taurines aux mineurs de moins de seize ans. Cette PPL a été présentée par Raymonde Poncet-Monge et 15 cosignataires du groupe EST. L'exposé des motifs, peu commun de par le nombre de références scientifiques et juridiques qu'il détaille, vise à étayer les conséquences néfastes de l'exposition à la maltraitance animale.  

Les précédentes propositions de loi

Plusieurs propositions de loi allant dans ce sens avaient été déposées à l'Assemblée durant les dernières législatures.

Sous la XIIIe législature :
. proposition de loi tendant à interdire l'accès aux courses de taureaux aux mineurs de quinze ans, déposée en septembre 2007 par Jean-Pierre Brard (PCF) et 6 cosignataires de gauche et du centre.

Sous la XIVe législature :
.
 proposition de loi visant à l'interdiction d'accès aux courses de taureaux aux mineurs de moins de quatorze ans, déposée en avril 2015 par Laurence Abeille (EELV) et 14 cosignataires écologistes.
proposition de loi visant à interdire aux individus mineurs de moins de seize ans d'assister aux évènements mentionnés au septième alinéa de l'article 521-1 du code pénal, déposée en juillet 2015 par Damien Meslot (LR) et 11 cosignataires LR.

Sous la XVe législature :
proposition de loi visant à interdire l’accès aux courses de taureaux aux mineurs de moins de quatorze ans, déposée en mars 2018 par Michel Larive (LFI) et 25 cosignataires de plusieurs groupes.
Nous avions rendu compte de cette dernière PPL dans cet article.

La suite ?

Le point commun entre les 4 PPL que nous venons de rappeler, c'est qu'elles n'ont pas été inscrites à l'ordre du jour de l'Assemblée, c'est-à-dire qu'elles n'ont jamais fait l'objet d'une discussion et d'un vote en séance publique. C'est en fait le sort de la plupart des PPL.

La prochaine étape de la PPL présentée par Mme Cazebonne et M Bazin est donc d'être inscrite à l'ordre du jour au Sénat par le président du groupe RDPI.
Nous espérons que le groupe RDPI saisira l'importance de l'enjeu. Cette question de l'accès des mineurs aux corridas fait l'objet de discussions politiques et juridiques dans tous les autres pays taurins de la planète, notamment en Amérique latine.

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