L'ASSPA : quand une association prônant l'inclusion assume le clivage
A l'occasion des Jeux Paralympiques 2024, une association locale ayant notamment pour objet de promouvoir l’inclusion des personnes handicapées grâce au sport espère faire parler d'elle.
Mais il y a un gros problème.
L'Association Sport Santé du Pays d'Arles
Dans un article du 28 août 2024, jour d'ouverture des Jeux Paralympiques de Paris, le quotidien régional La Provence a consacré un article à l'Association Sport Santé du Pays d'Arles (ASSPA).
Cette jeune association (elle existe en tant que telle depuis février 2022, et d'après son site a vu le jour en septembre 2022) annonce sur sa page Facebook se baser sur trois axes :
- Le sport-santé adapté pour des personnes ayant des pathologies, maladies chroniques et les seniors.
- Le sport solidaire permettant aux personnes les plus précaires de se retrouver pour favoriser le lien social et lutter contre l'isolement.
- L'inclusion par le sport: des activités partagées pour des adultes et enfants qui sont en situation de handicap et valides.
De tels objectifs ne peuvent que faire l'unanimité !
. Le fondateur de cette association est Thomas Joubert. Il est connu en tant que matador.
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. Le président en est son oncle, Robert Joubert, manifestement attaché à la fonction tauromachique de son neveu puisqu'il relaie sur son compte Facebook l'annonce du "retrait des ruedos" de celui-ci.
. La secrétaire de l'association apprécie manifestement la corrida, puisque la photo de couverture de son compte Facebook représente trois matadors "à hombros", dont Thomas Joubert :
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. Le trésorier est manifestement favorable à la corrida, puisqu'il participe sur son compte Facebook à la promotion d'un festival taurin prévu en octobre 2024 "au profit de l'école taurine du pays d'Arles" :
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. Le responsable communication de l'ASSPA a été quant à lui durant plus de 20 ans journaliste à La Provence, ce qui participe peut-être à l'intérêt de ce quotidien pour cette association. Et il y avait signé ou co-signé plusieurs articles favorables à la tauromachie, comme celui-ci ou celui-là, ce qui est sans doute obligé dans le cadre de la presse régionale du sud, mais qu'en tout cas il semble assumer.
A ce stade, on pourrait nous rétorquer : le fait que les administrateurs d'une association aiment voire pratiquent la corrida à titre personnel enlève-t-il de la légitimité à cette association ?
Non, assurément, dès lors que l'objectif de celle-ci est par ailleurs louable.
Mais le problème qui se pose ici est tout autre : en réalité c'est l'association elle-même qui a des accointances avec la tauromachie et qui participe à la promotion de celle-ci !
Les liens assumés entre l'ASSPA et le monde tauromachique
Prosélytisme en liaison avec l'école taurine du Pays d'Arles
Pour évaluer les liens entre l'Association Sport Santé du Pays d'Arles et la tauromachie, il suffit de consulter la page Facebook de l'association, la photo de couverture qui y trône depuis cinq mois en dit suffisamment long :
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Et cette photo illustre aussi un récent article du site de l'ASSPA intitulé "Sport pour tous : Faites le plein de découvertes".
Elle a été prise lors d'une journée de rencontre avec l'école taurine d'Arles le 25 mai dernier.
L'ASSPA en a rendu compte sur sa page Facebook.
Et sur l'article du website de l'ASSPA en rendant compte, également intitulé "Une journée taurine de rêve", on a droit à un album d'une soixantaine de photos !
Du côté de l'école taurine, on peut lire dans la publication Facebook consacrée à cette journée :
"Ce sont de beaux moments qu'ont partagé ce matin les élèves de l'Ecole Taurine du Pays d'Arles […] avec les membres de l'ASSPA chère à Thomas JOUBERT dans le cadre du programme d'inclusion par le sport.
[…]
les élèves ont partagé leur entraînement et poursuivi l'initiation des membres de l'ASSPA à la corrida dans une ambiance amicale et festive".
De son côté, dans un article de l'ASSPA intitulé "Les sports de tradition s’ouvrent à l’inclusion" , on peut lire :
"Une réussite entrevue dès l’année dernière, lorsqu’une séance d’initiation avait été proposée à la Chassagne. Dès lors, l’intégration des sports de tradition dans le catalogue de “Découvre ton sport” ne faisait plus de doute.
[...]
La philosophie de la tauromachie ne pouvait que rejoindre les principes défendus par l’association."
On peut aussi voir la photo suivante parmi les photos défilantes de la page d'accueil du site de l'Association Sport Santé du Pays d'Arles :
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Cette photo a été prise l'an dernier, le 17 juin 2023, également lors d'une journée d'initiation à la tauromachie avec l'école taurine d'Arles. On peut en voir une autre photo sur cet article de La Provence.
Yves Lebas, président de l'École Taurine d'Arles, s'exprime dans une courte vidéo mise en ligne sur la page Facebook de l'ASSPA et sur son website. Il met en avant "l'ouverture à l'autre" et "l'empathie"…
Cette "école" est l’une des 4 ou 5 associations françaises où les enfants s'entrainent à massacrer des bovins.
Il faut dire que c'est à l'école taurine d'Arles que Thomas Joubert, le fondateur de l'ASSPA, a fait ses armes, et a tué son premier veau à l'âge de 14 ans (cf cette capture d'écran tirée du site http://www.thomas-joubert-matador-de-toros.fr/cv-taurin/, devenu inaccessible).
La cape de paseo
Un sujet annexe est régulièrement présent dans les publications de l'ASSPA depuis 6 mois sur sa page Facebook ou son compte Instagram, c'est la vente de billets de tombola qui doit permettre aux participants de gagner une cape de paseo (la cape que portent les matadors en entrant dans l'arène lors du défilé d'ouverture). Le motif est bien sûr de reverser le fruit de la vente des billets à l'ASSPA.
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Le tirage au sort était initialement prévu fin juin (voir par exemple cet article de mai 2024 sur le website), mais la vente des billets n'a pas dû avoir beaucoup de succès : il a été reporté au 8 septembre (comme mentionné sur cette page "HelloAsso"), lors de la Féria du riz à Arles, durant laquelle 18 taureaux ou taurillons vont être massacrés.
En conclusion
Thomas Joubert a annoncé sa prochaine "retraite" en tant que matador. Mais il n'est pas près de se détacher du monde de la corrida.
La relation revendiquée entre l'ASSPA et ce monde de la corrida met à mal les objectifs de lien social et d'inclusion qu'elle invoque. Les pratiques tauromachiques cruelles, rejetées par la majorité des citoyens, sont plus que jamais un facteur de polémique et de clivage.
Et le prosélytisme qu'elle met en œuvre est d'autant plus problématique qu'il concerne notamment des personnes vulnérables.
Mais apparemment, ça ne gêne pas les partenaires et les sponsors de l'association.